Elke de Rijke : « Environnement »

Et que je savais que j’étais celui à qui il était décrété

d’être à tes côtés,

et que tu le savais aussi, bien que ne connaissant pas

mon visage,

latéralement hors de ta vue

ou derrière toi, sur ton épaule,

Et comme je suis cousu à toi par l’âme

dont je ressens les couleurs et les modulations,

me voici ici aussi effaré que toi

qui étais si fort et si droit,

ne sachant moi-même ton heure qui, ici, est venue ―

 

corps tombe en arrière dans un trou,

meurtri et encore chaud et solide mais ne

sait plus bouger les bras,

à peine mort,

suis-(je) mort,

les blessures sèchent leur sang et les yeux

ne voient rien dans

visage décédé sur sa nuque,

à la vitesse de la lumière pensée est privée de

corps,

et corps toujours

est aspiré dans une noirceur insondable bien qu’inondé par un éclat ―

 

Ahuri,

Accouru d’ailes noires aussi larges que croissantes du noir

pour que ta chute ne soit pas seule

mais soutenue,

mes mains te rassurant

que tu n’es pas seul

dans cet acheminement vers

Mais ne puis cacher mon effarement

dans ma bouche entr’ouverte de larmes et mes yeux

traversés de sels

baignant dans des poches ―

 

à une main si fine, féminine, corps léger

retient qui fut mon corps de bras musclés,

est-ce oreiller de plumes dans gravité de plomb,

peut-être frôlement d’ailerons,

douceur inespérée, puissance agile aérienne

et adossement de cou contre qui fut mon cou,

effleurement de plis coloriés

aux côtés comme si

soupir ―

 

suis avec toi dans cette tombée

mon apparence ne verras pas, mais sentiras autour (de toi)

cette extension qui porte ―

relâche dans qui est transition

et livre-(toi) à mes mains

 

(Giorgione, le Christ mort soutenu par un ange (1507) /2020)