Béatrice Renard : « D’une soeur à un frère… »

De P. à L.

 

Ô mon frère !

Haut, mon frère,

dans mon cœur en misère

 

Un azur noir et bas

S’abat sur moi

Tissé de cordes et soies

 

Ciel brodé de souvenirs

Je tire sur un fil et il pleut des sourires

Ma mémoire de sœur ne te laissera pas partir

 

Mon frère, tu ne vieilliras pas

Tu reviens déjà

Te voilà enfant, riant aux éclats

 

Et puis adolescent

Course à travers champs

Par-dessus les ornières, nez au vent

 

Devenu homme fier

Electrifié par la mer

Sur le pont, tout autour de la terre

 

Et à tes retours de voyage

Tatoué sur ton visage

De l’amour en haut-voltage

 

Mon frère, si loin, si près,

Tu aimais comme tu respirais

Aux petits soins, bonté sans filet

 

Sans cesse, tu allais et venais

Ton dos portait

Comme cent soleils, tes yeux riaient

 

Puis un virus minuscule, tout petit

Surgi au milieu des myosotis

Est venu te cueillir à Paris

 

C’est fini, tu ne respires plus

Toi, et des milliers de disparus

Tant de chagrins mis à nu

 

Mais au creux des malheurs

Bourgeonnent à toute heure

Des vers, des chants et des fleurs