QUIZZ DE L’AUBE
□ A □ B □ C □ D □ E
COCHE A si…
Ta langue est un boa. Constriction des réacs.
Pas besoin de venin pour l’attaque antifa.
Tu saisis, tu serres, tu avales et tu digères.
L’arnaque dissoute dans un acide pur et fier .
« INDEX DES POÈMES DISPONIBLES
Taha Adnan : « Corona versus » (مقام العزل) (+vidéo)
Jean D’Amérique : « nuit lacrymale »
Hubert Antoine : « Réservez-moi un rêve »
Jan Baetens : « Nous te couvrons de larmes et de linges… »
Antoine Boute : « Partir c’est habiter radicalement partout… »
Eric Brogniet : « Rose noire » (+vidéo)
Carino Bucciarelli : « Mars 2020 »
Valérie Carbonnelle : « Toi qui as aimé »
Thierry-Pierre Clément : « Notre amour est avec toi »
Pierre Coran : « Devoirs »
Thibaut Creppe : « L’autre côté du soir » (+vidéo)
Serge Delaive : « Lacune » et « Pour la soif »
Aurélien Dony : « C’est jour de triste… » (+vidéo)
Claude Donnay : « Fleurs de funérailles »
Charles Ducal : « Sauf toi » (+vidéo)
Perrine Estienne : « Toucher » (+vidéo)
David Giannoni : « Il est un fleuve pour nous toutes… »
Leo Gillessen : « La nuit est claire… »
Aliette Griz : « De quoi avez-vous besoin pour ce voyage ?… » (+vidéo)
Corinne Hoex : « Le pays lointain » (+vidéo) et « La dernière neige »
Peter Holvoet-Hanssen : « Chant de grenouilles »
Maud Joiret : « Nous avons dit aux heures… »
Gioia Kayaga : « Turi Kumwe (On est ensemble) » (+vidéo)
Jessy James LaFleur : « Ein Ort namens Ewigkeit »
Werner Lambersy : « Je n’étais pas là… » (+vidéo)
Soline de Laveleye : « Toi qu’embrasse la lumière »
Pascal Leclercq : « Reste la vie que j’avais cru si douce… » (+vidéo)
Philippe Leuckx : « Prières, poèmes »
Béatrice Libert : « Ce matin-là » et « Paroles du soir »
Françoise Lison-Leroy : « Tant de choses à te dire… »
Karel Logist : « Comment se tenir là pour te dire au revoir?… » (+vidéo)
Lisette Lombé : « Parmi les tristes, je me tiens debout… » (+vidéo)
Jean Loubry : « Puisque… »
Veronika Mabardi : « Tu n’es pas loin, non… » (+vidéo)
Manza : « Il y a ceux qui partent trop tôt… »
Dominique Massaut : « Habiter les autres »
Paul Mathieu : « Assis au seuil… »
Christian Merveille : « On n’aurait jamais pu imaginer cela » (+vidéo)
Serge Meurant : « Dans l’ignorance de ce qu’il vécut… »
Yves Namur : « (Un poème de circonstance) » (« (Poem for the occasion) » ; « (Poema de circunstancias) »)
Lucien Noullez : « Qui pousse dans le dos ?… »
Lucie Niclaes : « L’ange-nuit »
Tom Nisse : « Prières »
Colette Nys-Mazure : « Nous allons sans savoir… »
Jean-Luc Outers : « Le son de la terre » (+vidéo)
Anne Penders : « Myosotis »
Francesco Pittau : « Tu es là… » (+vidéo) et « Je n’ai pas pleuré sur ta tombe… »
Béatrice Renard : « Le plus difficile » (+vidéo)
Milady Renoir : « En deux temps » (+vidéo)
Elke de Rijke : « Environnement »
Laurent Robert : « Consolation contre le temps »
Marie-Clotilde Roose : « Est-ce que Tu nous attends ?… »
Timotéo Sergoi : « Les valises » (+vidéo)
Peter Theunynck : « Bonne nébuleuse » (+vidéo) et « Les esquimaux »
Jérémie Tholomé : « On laisse »
Vincent Tholomé : « Le grand partage » (‘The great divide ») (+vidéo)
Jean-Pierre Verheggen : Mort où est ta victoire? (+vidéo)
Anne Versailles : « Ce matin, j’ai changé l’eau des fleurs… » (et traduction espagnole) (+vidéo)
Laurence Vielle : « Au revoir… » (et traductions espagnole, turque, flamande et anglaise) (+vidéo)
Pierre Warrant : « Que reste-t-il… »
Avec le soutien de la Loterie Nationale et ses joueurs.
COCHE A si…
Ta langue est un boa. Constriction des réacs.
Pas besoin de venin pour l’attaque antifa.
Tu saisis, tu serres, tu avales et tu digères.
L’arnaque dissoute dans un acide pur et fier .
Vas-y ! Vas-y, le bras !
T’arrête pas pour moi !
Surtout, t’arrête pas !
Tourne, tourne.
Cherche la brûlure.
On s’arrangera avec l’épaule, demain.
On s’excusera pour la couture de la manche, pour l’arrachement, pour la souffrance, demain.
Vas-y, le bras !
Tourne, tourne.
Cherche la brûlure.
Étourdis les sentinelles du temps.
Tourne, tourne.
Et rappelle-toi de toi il y a dix ans.
JE DANSE
langue loque,
piment de la première strophe,
ligne de sueur sous mon poumon politique,
bracelets de cheville en verre pilé.
Piétiner toute poésie qui ne saignerait pas assez.
JE DANSE
robe blanche, linceul de l’éveil,
épaules recouvertes de pollen.
Ma mère dit que ça ne se fait pas, quand on a des voisins,
de faire sécher ses petites culottes dans le jardin.
Et je la crois.
Mémoires friables.
Fenêtres ouvertes.
Vent frais sur nos fronts.
Seconde de silence
juste avant les applaudissements.
Vingt heures pile.
Encouragements censés s’envoler vers le personnel soignant
mais élan inverse de l’hélium.
Ballon d’espoir qui se dégonfle au pic des contaminations,
retombe sur le flanc,
à côté d’une haie
de déshonneur.
DEMANDEZ-MOI pour qui je voterai aux prochaines élections, pour qui j’irai glisser dans les urnes le ticket gagnant du futur de mes enfants
et vous comprendrez le mot CONFIANCE.
DEMANDEZ- MOI pardon pour la gauche guimauve, pardon pour la droite draculesque, pardon pour le ventre fourre-tout du centre, sincèrement pardon
et vous comprendrez le mot COURAGE.
DEMANDEZ-MOI combien de couleuvres, combien de sornettes, combien de gouttelettes de spermes ou de sottes promesses j’ai avalées depuis mon adolescence
et vous comprendrez le mot DOMINATION.
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Comme un harpon,
planté droit dans le carré de chair le plus vulnérable
d’une bête se croyant à l’abri de la voracité des hommes,
voilà que se sont mises à déferler,
sur mes sages journées,
les images de ces enfants
bien plus jeunes que la plus jeune de mes enfants.
Ai tenté d’éviter mâchoire du haut qui tremble
et mâchoire du bas qui tremble dans l’autre sens.
Ai tenté d’éviter foyers gravats civières cendres visages poussière vivres balancés du ciel bombes ruades réflexes de survie affolement filets de sang morts décomptes vertige otages fantômes chiffres documenter documenter attaques noms prénoms familles fosses hôpitaux de fortune frontières peau de chagrin danser tomber sol larmes sept octobre faillite collective militaires rapine selfies jouets lingerie bijoux barrages corps documenter outrages documenter linceul international documenter une jambe au lieu de deux un bras au lieu de deux un parent au lieu de deux alignement alignement minuscules draps blancs.
Ai tenté,
quelque part entre bonne et mauvaise conscience.
Ai tenté d’éviter
mais déjà déroute,
mais déjà désastre,
passés de la rétine à la moelle sensible.
Un enfant,
le redire,
bien plus jeune que la plus jeune de mes enfants,
partage sa ration de nourriture avec un chien.
Division du dénuement.
Un autre,
à plat ventre dans la boue,
boit l’eau d’une flaque.
Soif de justice.
Un autre dit : « Ton père est un martyr »
Orphelin automate.
Petites mains pinces de crabe.
Sphincters ouverts.
sous la vareuse de foot,
un cri cherche sa voix.
Belgique
sur tes routes tantôt déchirées
tantôt semées de pavés ricanants
je me suis lancé, tout bêtement comme le sang qui circule
je voulais déterrer les trésors de ta glaise
mais ne sachant où les trouver, j’ai pris la mer
hissé les voiles et vogué vers des horizons délaissés
le fameux bâton des ancêtres, taillé dans un
arbre glorieux, m’a montré le chemin quand je m’égarais
pendant que fébrilement je vous cherchais, il m’a parlé
son langage était antédiluvien
un frissonnement montant du ventre de la terre
nous a traversés lorsque nous avons compris tous les deux
qu’il importait peu que nous parlions la langue de l’autre
et dès que nous l’avons su, est venu l’adieu rédempteur
de ceux qui n’avaient pas aimé qu’avec les yeux
Mustafa Kör
Traduction : Katelijne De Vuyst, avec Danielle Losman et Pierre Geron
Bibliophile
Ce sont des promesses que tu espères décrocher
sous abri comme ruches bourdonnantes
Un coup d’œil a suffi il t’en fallait plus
pour vivre
Zigzaguant, longeant les échines, tu cueilles
aux rayons bien gorgés ci et là quelques fruits
Chaque fois que tu en touches un, corps et âme
tout s’illumine
Sous l’emprise d’une grande clarté tu chasses
depuis en territoire conquis. Le butin escompté,
feuilles d’or et lucidité
Sous cette charpente reposent d’éternelles merveilles
à portée de main, comme des bonbons. Cela, tu l’as senti
d’emblée. Depuis les jupes maternelles
tu as levé les yeux et ton Big-Bang s’est accompli
Mustafa Kör
Traduction : Danielle Losman, avec Katelijne De Vuyst et Pierre Geron
Seul
une mer d’acier nous séparait
échoué d’un autre bord
sur ce rivage hostile je vous ai trouvé
les vagues vous lavent, préparent la levée du corps
vous délivrent en votre grande solitude
la solitude appartient au créateur
est-ce pour ça que j’incline la tête et exhume
des prières pour votre passage
si l’on vous oublie, je me demande
une telle mort, sera-t-elle notre destin
ou aurons-nous miséricorde
votre dernier soupir
la houle qui m’a porté vers vous
à peine ai-je frôlé votre rivage que
je rejoignais la tempête qui n’apportait plus rien
que des vers tardifs dans le silence que vous nous laissiez
Mustafa Kör
Traduction : Danielle Losman, avec Katelijne De Vuyst et Pierre Geron
Bon vent
Ce n’est pas un adieu
C’est-à-dire pour qui aime
Avec son corps
Mustafa Kör
Traduction : Pierre Geron
Grands enfants
Tu te réveilles et tu vois un monde déchiré
Aussitôt tu deviens une grande personne
Qui doit retenir ses larmes pour des parents
Tu veux bercer la terre la rendormir
Dire que tout s’arrangera
Comme le promettaient les affiches sur tes murs
L’enfance c’était attendre et subir
Mais aujourd’hui tu as le premier choix
Dans la sélection d’un avenir
Tiré du bac à balles que je t’ai apporté
Pour qu’un moment encore tu restes un simple enfant
Inventeur du rire généreux
Mustafa Kör
Traduction : Katelijne De Vuyst, avec Danielle Losman et Pierre Geron
tuessibellesibelle oh tu es si belle tu es la plus bellet
u as des yeux à s’y perdre de si beaux yeux je nai ja
mais ils brillent de mille feux et tes lèvres leur mervei
lleuseforme sublime roseprofond lèvreslumineuses v
raiment uniques qui invitent aux baisers et tes mains
et tes doigts dieu comme tracés au pinceau gracieux
et fuselés comme des vignes au soleil àsaluer avecr
évérence ton rire désarmant rire éclatant qui chasse
les soucis et invite à rester près detoi àte rejoindrese
montrergénéreux commetoi latendre laplustendredou
ce et bellebellepersonne adorée depuistoujours jet
aime
Mustafa Kör
Traduction : Katelijne De Vuyst, avec Danielle Losman et Pierre Geron
Sans gêne
Je suis un étrange enfant qui
échoué des quatre coins du monde
parle l’abc du shaman
Frontière ni drapeau ne me sont étrangers
je connais les confins de Matin et Soir
où j’arrive s’ouvrent des yeux et des oreilles
Je castagne des sévillanes débite des mots sur scène
et chante des refrains que tu veux comprendre
quand tu te décides à vraiment les écouter
Mais mon accent mi ! là. si. da. nee, frère
a déplacé l’ ان شاء الله d’autant de bornes
qu’il pouvait bâillonner de bouches radoteuses
Bah, je ne suis qu’un étrange enfant
doté d’un étrange langage que je dois gesticuler et
signer en panaches de fumée pour être entendu
On m’a appris que chaque langue est un humain
et plus tu parles de langues
plus tu deviens un humain
Mustafa Kör
Traduction : Katelijne De Vuyst, avec Danielle Losman et Pierre Geron
Le dernier Noir
Il faut du courage pour encore être un arbre
Même toi tu l’admettras
Ton destin a beau être devenu bourgeonnant chagrin
Tu caresses encore l’espoir d’une éclosion ancestrale
Le chant du cygne des noirs
Seul avec mon ombre qui s’allonge et s’amenuise
où jadis se réfugia un monde
de légionnaires et de jeunes vandales
Quel sera votre sort
entre montagnes de béton
sans oiseau ni loup
Je suis un vieil arbre
dont les jours sont comptés
Je tremble encore un instant
Avant de partir
je sème à tout vent mon courage
telle une prière sur la verte terre de Dieu
Mustafa Kör
Traduction : Katelijne De Vuyst, avec Danielle Losman et Pierre Geron
Femmes de la mine
Elles ont cédé aux puits
les plus profonds
leurs maris et leurs fils
Fouiller au cœur de l’obscurité
où gisent de préhistoriques colosses
Y descendre, c’est une chose
en ressortir sain et sauf, c’est autre chose
Appel ou chant des sirènes
Quelque chose les a ensorcelés
L’or de la terre reposerait là enclavé
dans la pierre et l’infinie poussière
Ils y taillaient leur pain noir pour finir
toussant saignant s’effritant
Mais un cœur de femme le sait bien
Pour celles qui ont donné la vie
rien n’est pire que d’attendre
Dans le monde ouvrier on accouche
des héros du pain quotidien car quelqu’un
doit braver l’obscurité et le danger
Entre des mains et des poumons meurtris
ils ramènent chez eux leur lumière
pour en inonder la table où l’on mange
Mustafa Kör
Traduction : Katelijne De Vuyst, avec Danielle Losman et Pierre Geron
Peur du passage
Au revoir
Ceci est un adieu d’amertume
Un voyageur est bien obligé d’être en chemin
Sain et sauf
Allant et venant entre
Bien aimés
Une ville bourdonnante
Bonne. Route
Bon vent. Vers où ?
Ceci n’est pas un voyage, pas pour mon espèce
Spastique, mongole, sénile
Les obstacles, on les franchit lorsqu’ils se présentent
Qu’en est-il des dos d’âne ? Et des pieds de plomb ?
La quête quotidienne sur les rails et l’asphalte
Arbitraire rageur face auquel nul seigneur ne se lève
mais s’incline comme il se doit
Le calvaire du voyageur d’un jour
L’itinéraire des paralytiques et des aveugles
Je ne craindrai plus rien
si tout le monde s’énerve de notre attitude vis-à-vis
des infirmes et les arrêts dans les salles d’attente et les gares
Valides ou estropiés
Pourquoi partir, si d’office, nous nous échouerons ?
S’échouer. Se planter. S’enliser
Suffit de quelques pouces d’eau
Nous voulons la mer
Mustafa Kör
Traduction : Katelijne De Vuyst, avec Danielle Losman et Pierre Geron
Tombent les feuilles
Pour cet adieu prématuré
tout sonne faux
chant du coq, choeurs d’enfants, mon coeur battant
Tu avais une fenêtre
qui donnait sur les toits
et les champs d’un village de Flandre
par temps clair les crêtes de la capitale
Tu voulais exister
as pendu ton manteau dans un lieu lointain
inconnu de tous
Quelle importance alors
que règne la paix
ou que la récolte soit bonne
Souvenirs de
tout y porte le parfum d’une
chose fleurie avec l’automne dedans
Les chats des rues
la fille d’en face
chacun connaît ton nom
et l’histoire de ton cri devenu soupir
tu es ici
frère, ami, voisin, enfant de tous
Telle des feuilles tombées en mai
ton odeur descend sur villages et champs
prématurément
Mustafa Kör
Traduction: Pierre Geron en collaboration avec Katelijne De Vuyst et Danielle Losman
vers vous
levez la tête hors de cette heure sombre
bientôt notre voie sera libre et notre pas à nouveau léger
entretemps nous parcourons des lieux où nous revigorent
des pains épargnés d’autres bouches
à présent nous allons nous
offrir des mots sans les posséder
des mots vifs lestes qui nous
des pensées aérées éclairées qui vous
font ployer pour ouvrir avec des vers
encore plus droits plus baroques les coeurs
les pièces et les frontières où nous rêvassons jusqu’au moment où
le mortel se décompose et allant
vers vous adopte une voix lavée
levez la tête
monarques et suiveurs ne pèsent pas lourd
nous sommes déjà la terre vers laquelle nous partons
nous saurons domestiquer aussi cette nouvelle vie
car nous sommes des paysans patients
qui se récoltent sillon après sillon
Mustafa Kör
Traduction: Pierre Geron en collaboration avec Katelijne De Vuyst et Danielle Losman
« Une des grandes émotions de Fleurs de funérailles est la surprise que nombre d’adolescents nous ont écrit, à moi ou à la Maison de la Poésie de Namur, pour exprimer leur soutien, parfois avec un poème. Je voulais à titre symbolique en publier un ici, sur notre site national et qu’il soit mêlé à ceux de nos grandes poétesses et poètes. Il s’agit ici d’une étudiante de 19 ans, Lucie Niclaes, que je remercie pour ces mots où douleur bascule d’une lettre, devient douceur. À travers elle, merci à tous ces jeunes qui, depuis leur confinement, nous ont manifesté leur soutien. Ce qui me touche profondément, au-delà de ces poèmes, est l’acte qui nie le conflit ou le passage des générations : écrire simplement pour l’autre, qu’on ne connaît pas, qui n’a pas notre âge, ni nos chemins. La parole donnée pour don, sans rien attendre. »
– Carl Norac
Mystifiant la douleur, dans l’ombre il attend
Ange bleu sur les eaux où miroite une promesse
Les secondes qui précèdent le bouleversement
À l’instant de la mort mon regard le caresse
Saisir le rivage de ce rêve éveillé
De la lumière mate sur une dernière fumée
Le tambour a battu, l’heure du départ est là
Je souffle sur la flamme de la vie qui s’en va
Si le ciel m’est témoin, ô que ce soir est doux
Les feuilles prennent la rosée et chuchotent leurs adieux
Sur le rivage clos, la lumière est de vous
Qui m’avez préparé, à votre insu, ce lieu
Que mon souffle t’accompagne, que mon regard soit tien
Ton empreinte dans mon cœur me fera respirer
Ton odeur restera comme une mince nuée
Parfois la sensation d’une petite main
Il est tard. Il est temps. Je vais vous embrasser
Je m’épuise à attendre devant ces eaux de marbre
Un ange souriant est debout sur la barque
Et m’attend, rayonnant, pour ma traversée
Je reviendrai à vous, et un jour je serai
Celle qui préparera votre rivage à vous
C’est le cœur amoureux que je vous ai laissé
Que le ciel soit témoin, ô que ce soir est doux
Je n’ai pas prié sur ta tombe ni pleuré
ni imploré le ciel et encore moins vociféré
mon inutile colère
me suis éloigné sur l’allée caillouteuse
regardant çà et là les pierres fraîches
et les pierres moussues où dorment des enfants
ombragées par les cèdres qui parlent avec une voix
d’oiseau me suis éloigné vers la ville bruissante
de chaleur
Les jours sont accrochés aux fenêtres
comme des pots de fleurs sur les murs
les vignes s’agriffent avec la vigueur
farouche des choses qui ne durent pas
«Où vas-tu donc de ce pas incertain ? sinon
vers un lieu inconnu peut-être un bistrot frais
une bulle d’ombre dont la douceur apaise»
Assis à une table au plateau de marbre
un chant funèbre désarticulé
me vient aux lèvres un murmure un marmonnement
fait de syllabes insensées : le minder des
sytes kave la mince écision l’apstre ému
— et puis le silence.