Lucie Niclaes : « L’ange-nuit »

« Une des grandes émotions de Fleurs de funérailles est la surprise que nombre d’adolescents nous ont écrit, à moi ou à la Maison de la Poésie de Namur, pour exprimer leur soutien, parfois avec un poème. Je voulais à titre symbolique en publier un ici, sur notre site national et qu’il soit mêlé à ceux de nos grandes poétesses et poètes. Il s’agit ici d’une étudiante de 19 ans, Lucie Niclaes, que je remercie pour ces mots où douleur bascule d’une lettre, devient douceur. À travers elle, merci à tous ces jeunes qui, depuis leur confinement, nous ont manifesté leur soutien. Ce qui me touche profondément, au-delà de ces poèmes, est l’acte qui nie le conflit ou le passage des générations : écrire simplement pour l’autre, qu’on ne connaît pas, qui n’a pas notre âge, ni nos chemins. La parole donnée pour don, sans rien attendre. »

– Carl Norac

 

Mystifiant la douleur, dans l’ombre il attend

Ange bleu sur les eaux où miroite une promesse

Les secondes qui précèdent le bouleversement

À l’instant de la mort mon regard le caresse

 

Saisir le rivage de ce rêve éveillé

De la lumière mate sur une dernière fumée

Le tambour a battu, l’heure du départ est là

Je souffle sur la flamme de la vie qui s’en va

 

Si le ciel m’est témoin, ô que ce soir est doux

Les feuilles prennent la rosée et chuchotent leurs adieux

Sur le rivage clos, la lumière est de vous

Qui m’avez préparé, à votre insu, ce lieu

 

Que mon souffle t’accompagne, que mon regard soit tien

Ton empreinte dans mon cœur me fera respirer

Ton odeur restera comme une mince nuée

Parfois la sensation d’une petite main

 

Il est tard. Il est temps. Je vais vous embrasser

Je m’épuise à attendre devant ces eaux de marbre

Un ange souriant est debout sur la barque

Et m’attend, rayonnant, pour ma traversée

 

Je reviendrai à vous, et un jour je serai

Celle qui préparera votre rivage à vous

C’est le cœur amoureux que je vous ai laissé

Que le ciel soit témoin, ô que ce soir est doux